Le volet judiciaire de l’attentat du Drugstore, commis par Carlos à Paris le 15 septembre 1974, se poursuit.
Le 14 novembre 2019, la Cour de cassation a cassé et annulé partiellement l’arrêt rendu, le 15 mars 2018, par la Cour d’appel de Paris (https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_criminelle_578/2207_14_43882.html). Cet arrêt condamnait Carlos à la perpétuité.
Nous allons nous attacher à rendre lisible cet arrêt de la Cour de cassation et à vous en expliquer les conséquences.
Le rôle de la Cour de cassation n’est pas de juger le fond de l’affaire, ce pourquoi l’accusé est poursuivi, mais de vérifier si les juges du fond ont bien appliqué la loi.
Pour saisir la Cour de cassation, il faut former un pourvoi en cassation.
Ainsi, lorsque la Cour de cassation est saisie, elle peut rejeter le pourvoi, estimant que la loi a bien été respectée, ou elle peut annuler la décision prise par les juges du fond, estimant que la loi n’a pas été respectée.
Dans le cas de l’attentat du Drugstore, la Cour de cassation a estimé que la loi n’a pas été correctement appliquée. Pourquoi ?
En Droit, un principe innerve toute la matière pénale résumé par la locution latine « Ne bis in idem ». Cela signifie que nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement (une seconde fois) à raison des mêmes faits. C’est un principe fondamental du droit qui connait plusieurs applications concrètes.
Pour ce qui nous intéresse, La Cour de cassation rappelle que ce principe implique que « des faits qui procèdent de manière indissociable d’une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même accusé, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes ».
À quoi cela fait-il référence ? Pour faire simple, c’est lorsqu’une seule action répréhensible est composée de plusieurs faits matériels qui, pris isolément, sont eux-mêmes répréhensibles.
Par exemple, le vol est répréhensible et le recel (le fait de conserver le fruit du vol) l’est aussi.
Or, le voleur de voiture, une fois le larcin effectué, devient aussitôt receleur car il a en sa possession la voiture qui est le fruit du délit de vol. Une seule et même action, une seule et même intention mais, sur le papier, deux délits distincts. Or, le recel est la conséquence du vol car le voleur devient forcément, même brièvement, le receleur. Selon le principe «Ne bis in idem », on poursuivra l’auteur pour le vol uniquement.
Concernant Carlos, il a été condamné pour assassinats, tentatives d’assassinats, et de destructions, dégradations dangereuses pour les personnes commises par l’effet d’une substance explosive. En somme, il a été condamné pour l’attentat du Drugstore.
En parallèle, il a été condamné pour transport ou port, hors de son domicile et sans motif légitime, d’un engin explosif assimilé à la catégorie A, en l’espèce une grenade à main explosive défensive d’origine américaine. En somme, il a été aussi condamné pour port d’arme.
Or, la Cour de cassation a estimé que le port et le transport de la grenade était une opération préalable nécessaire à la commission de l’attentat. Elle souligne que cette opération procède, de manière indissociable, d’une action unique avec les autres infractions caractérisée par une seule intention coupable : commettre l’attentat.
Ainsi, selon le principe « Ne bis in idem » il s’agissait selon la Cour de cassation d’une seule et même action coupable qui ne pouvait donner lieu à une déclaration de culpabilité distincte. Or, Carlos a été reconnu coupable et condamné pour les deux à la réclusion criminelle à perpétuité.
Ainsi, la Cour de cassation annule la déclaration de culpabilité de Carlos concernant le port d’arme et renvoie l’affaire devant la Cour d’appel de Paris pour qu’elle juge à nouveau Carlos mais uniquement sur la peine.
La peine encoure par Carlos reste la réclusion criminelle à perpétuité.